Des jumeaux en équipe nationale – Mehdi et Sadok Ben Romdhane vivent leur rêve

Vendredi soir, 6 janvier 2023. 16 minutes et 42 secondes sont jouées dans la partie de la Yellow Cup entre la Suisse et le Japon lorsque l’entraîner national Michael Suter procède à un changement de bloc. Le poste d’arrière droit est désormais occupé par l’homme portant le numéro 38, mais il manque encore un nom sur son maillot.

Les fans de handball suisse peuvent déjà mémoriser ce nom en toute confiance – ou le connaissent déjà. Sadok Ben Romdhane est, selon Suter, « l’un des gauchers les plus talentueux du pays » et le frère jumeau de Mehdi, qui joue à l’arrière gauche après ce changement de bloc à la 17^e minute.

« Pour moi, c’est un grand honneur de jouer pour la Suisse et c’est d’autant plus spécial de me retrouver sur le terrain avec Mehdi », explique Sadok. Mehdi a déjà un peu plus d’expérience dans ce domaine. Il a fait ses débuts en équipe nationale A lors de la mémorable victoire initiale de la Suisse sur l’Autriche, lors de la Coupe du monde 2021 en Egypte et a déjà disputé 15 matchs internationaux.

Les deux frères jumeaux ont désormais tous deux rejoint l’équipe nationale A. C’est un parcours remarquable si l’on considère d’où viennent Mehdi et Sadok. Fils d’immigrés tunisiens, ils ont commencé le handball à l’âge de neuf ans dans l’équipe M11 de Crissier, dans la périphérie de Lausanne. « Nous nous sommes aussi essayés à d’autres sports comme le judo, le football et le tennis. Mais le handball nous a toujours fascinés », se rappelle Mehdi.

Ce n’est pas étonnant. En effet, leur père Ameur Ben Romdhane est un ancien international des équipes juniors de Tunisie et a également été entraîneur-joueur à l’US Yverdon. « Nous avons assisté à des matchs de mon père dans la salle », expliquent les frères jumeaux, qui considèrent également leur père comme leur grand modèle. Par la suite, Ameur reprend une équipe junior de Crissier et entraîne lui-même ses fils. « Avant et après les entraînements avec l’équipe, nous faisions des heures supplémentaires tous les trois. Mais notre père ne nous a jamais forcés à le faire, nous avons simplement toujours été très ambitieux », raconte Sadok.

Au centre régional de performance du Hand-études de Crissier, ils débutent leur chemin vers l'élite durant la saison 2014/2015, avant de passer rapidement à l’étape suivante. Les frères jumeaux Ben Romdhane tentent leur chance en France, à l’académie de jeunesse de Chambéry. Un (trop) grand changement. « L’école était complètement différente. Et on s’est vite rendu compte qu’à Chambéry, on ne misait que sur les Français », se souvient Medhi. Par la suite, le contact est établi avec l’actuel entraîneur national Michael Suter, directeur de la Suisse Handball Academy à Schaffhouse.

Nouvel environnement, nouvelle langue, nouvelle formation de handball – Sadok et Mehdi déménagent en Suisse alémanique en 2017. « Nous avons plus beaucoup de contact avec nos collègues de Lausanne, mais ils suivent encore nos carrières sur Instagram », dit Sadok. A Schaffhouse, ils se seraient rapidement faits de nouveaux amis. Et tous deux ont également franchi sans problème l’obstacle du « suisse allemand », parlant sans difficulté en dialecte. « Les deux premières années, nous ne parlions que l’allemand standard. Mais entre-temps, je maîtrise mieux le suisse allemand », confie Mehdi en riant.

Les années d’apprentissage à Schaffhouse sont intenses, en plus des entraînements, tous deux font un apprentissage à la poste. « Mehdi et Sadok se levaient toujours tôt, soit pour l’entraînement, soit pour distribuer le courrier », se souvient Suter. Mehdi a passé la saison dernière à GC Amicitia, et fait en plus l’aller-retour à Zurich. « Mais j’ai toujours eu des objectifs élevés, c’est pourquoi j’ai toujours pris sur moi ces efforts supplémentaires », explique l’actuel joueur arrière des Kadetten Schaffhausen.

Cela en valait la peine. Mehdi participera même à la Coupe du monde en 2021, Sadok sera lui aussi international deux ans plus tard. La concurrence qui règne inévitablement entre les frères jumeaux a toujours été transformée en énergie positive par les deux frères. Sadok déclare à titre d’exemple : « Lorsque Mehdi a rejoint l’équipe nationale en janvier 2021, j’étais fier de lui. Et maintenant, il est fier de moi. » De plus, les deux hommes jouent à des postes différents : Sadok, gaucher, à l’arrière droit, et Mehdi, droitier, à l’arrière gauche. Ils ne se gênent donc pas.

Ils ont tous les deux encore un potentiel de progression. Michael Suter : « Physiquement, Mehdi a toujours été plus avancé que Sadok. Mais l’exemple de Sadok montre qu’il vaut la peine d’être patient en tant qu’entraîneur. Parfois, ce n’est pas si mal de n’arriver au sommet qu’à 21 ans. On a alors déjà appris beaucoup d’autres choses. »

Mehdi et Sadok Ben Romdhane sont deux des rares joueurs romands de l’histoire de l’équipe nationale suisse. Assument-ils aussi une fonction de modèle dans le handball romand ? « Les plus grands joueurs de handball en Suisse sont Andy Schmid et Nikola Portner. Il n’en va pas autrement en Suisse romande », dit Mehdi. « A Crissier, ils nous connaissent déjà, mais pour devenir un modèle, nous devons avoir plus de succès », affirment les frères jumeaux qui ont les pieds sur terre.

Dans les semaines à venir, le quotidien des Ben Romdhanes sera à nouveau la QHL. Mehdi a pris pied dans la première équipe des Kadetten Schaffhausen, Sadok est prêté cette saison au TSV St. Otmar St. Gallen. « Après toutes ces années passées ensemble, c’est aussi bien de faire différentes choses ! » Et voilà qu’on se rencontre aussi sur le terrain pour des duels directs. Sadok : « Mon tout premier match de QHL avec St. Otmar était justement contre les Kadetten et Mehdi. C’était très spécial. Lors de la deuxième rencontre à Schaffhouse ? Mehdi ? Sur le terrain ? Je ne le connais pas ! », s’amuse Sadok.

Les jumeaux ne sont cependant pas complètement séparés. Entre-temps, ils vivent dans un appartement commun dans la ville de Schaffhouse, Sadok se déplace à Saint-Gall.

Reste la question concernant l’avenir. « Un jour, nous voulons jouer dans une ligue plus grande, en France ou en Allemagne. Mais nous sommes encore jeunes et nous profitons du moment présent. Nous vivons notre rêve !», déclare Mehdi. L’entraîneur national Suter est certain que les deux jeunes ont le potentiel pour une carrière à l’étranger, mais il se réjouit d’abord de leurs performances en équipe nationale.

Peut-être déjà lors de qualifications pour l’Euro contre la Hongrie le 9 mars au domicile des frères Ben Romdhane, à Schaffhouse.

Source: Raphael Bischof (Text), Muriel Fiechter (Übersetzung), Estelle Zahner (Video)